Archives de Catégorie: Sélections

Prix Artémisia 2015 : la sélection

 

Log. Artémis (1)Découvrez les dix bandes dessinées de talentueuses auteures dans la sélection pour le prix Artémisia 2015! La lauréate sera proclamée le 9 janvier, date anniversaire de la naissance de Simone de Beauvoir. Le PRIX sera remis le mardi 27 janvier à partir de 18h30 à la Librairie LA HUNE, 16, rue de l’Abbaye –75006 Paris

100 demons-couvMES CENTS DÉMONS de Lynda Barry, Çà & là

A travers une série de strips inspirés des pratiques zen, Lynda Barry livre avec humour une sorte de journal intime, où elle met en scène les événements drôles ou douloureux qui ont fait d’elle ce qu’elle est. Ni fiction, ni autobiographie, cette «autobifictionalographie», supportée par un dessin faussement enfantin, s’empare de l’anodin pour exorciser les démons de l’enfance et de l’imagination. Un exercice jubilatoire.

lillianLILLIAN THE LEGEND de Kerry Byrne . Agrume

Lillian the legend est l’histoire vécue d’une jeune Russe partie dans les années 20 tenter sa chance économique aux USA. Sur place l’expérience de la misère puis l’incendie de son usine l’incitent à retourner chez elle, chemin que, faute d’argent, elle parcourra à pied jusqu’au détroit de Béring. La narration récitative est portée par un graphisme puissant, au style d’imagerie populaire qui rappelle D. Baldaev.

Couv-LacherPrise-webLÂCHER PRISE de Miriam Katin . Futuropolis

Installée à New York, la dessinatrice d’origine hongroise Miriam Katin a définitivement tourné le dos aux souvenirs de la guerre et du nazisme qu’elle évoquait dans Seules contre tous. 60 ans plus tard, son fils qui veut s’installer à Berlin la confronte de nouveau à cette histoire. Les planches au crayon jonglent avec humour entre anecdotes et questions existentielles, accompagnant la réconciliation du présent avec l’avenir.

moderneMODERNE OLYMPIA de Catherine Meurisse . Futuropolis

Les tableaux et leurs personnages s’ennuient au Musée. Les figures sortent du cadre, libérées par le pinceau habile de Catherine Meurisse. Ils s’autonomisent et, échappant à leur destin de modèles deviennent les vrais acteurs de cette comédie musicale graphique. Ainsi de l’Olympia créée par Manet en 1863, qui, coiffée d’un seul ruban, part dans de folles aventures, accompagnée du Fifre du même Manet. Un hommage à l’art dont la dessinatrice de Mes Hommes de lettres et du Pont des arts a le secret.

O CruelleÔ CRUELLE de Nadja. Actes sud BD

Tout en terminant sa tétralogie féministe sur Les filles de Montparnasse, Nadja nous embarque dans une rêverie à travers le regard d’une femme, qui connaît les confidences entre filles, et devine ce que seraient les pensées secrètes des hommes. Le pinceau est celui d’une peintre, un trait épais, gracieux, des personnages fortement soulignés à la manière des nabis –sauf que l’auteure, libre de ses sens, est bien d’aujourd’hui.

nikiNIKI LE JARDIN DES SECRETS de Dominique Osuch et Sandrine Martin . Casterman

Niki de Saint Phalle ou comment une jeune bourgeoise violée par son père réussit à lui rendre la pareille. Entendez, force l’imaginaire du père, des pères et de la société patriarcale, organisée comme un seul et même phallus (à étages), à intégrer la créativité de l’Autre: la Femme. Servi par un récit bien nourri par son sujet même et par des dessins en empathie avec leur modèle, un album qui témoigne de cette magnifique trajectoire.

Literary-Life-de-Posy-Simmonds_full_news_leftLITERARY LIFE de Posy Simmonds . Denoël Graphic

Dans ces chroniques du Guardian, Posy applique à ses victimes – éditeurs, écrivains, critiques, poseurs et autres « gendelettres » – la finesse, l’acuité, l’ironie tendre et cruelle qu’elle destinait aux héroïnes de ses fameux romans graphiques, Gemma Bovery et Tamara Drew. Page à page, elle compose une réjouissante Foire aux Vanités moderne, à la fois proche et bien loin des folles époques de Jane Austen, Thackeray, ou P.G. Wodehouse.

cet étéCET ÉTÉ-LÀ de Jillian et Mariko Tamaki, . Rue de Sèvres

Comme tous les étés, Rose part en vacances avec ses parents retrouver la plage et sa copine Windy. Cet été-là, pourtant, la jeune fille a 13 ans, et rien n’est plus comme avant. De l’enfance à l’adolescence, ce roman graphique de 300 pages émerveille par le dessin. Une initiation soutenue par un scénario réaliste qui rythme avec justesse la narration au ralenti, en laissant aux planches le temps de la contemplation et du silence.

teufLE FRONT D’ALSACE d’Anne Teuf . Delcourt

Juillet 1914. Joséphine, surnommée Finnele, partage sa vie entre l’école de son village d’Alsace et l’église où officie son père pasteur. La menace de la guerre accompagne celle de la mobilisation des hommes et l’éclatement de la région entre Allemagne et France. A partir du récit de sa grand-mère, Anne Teuf projette le regard d’une enfant sur cette période trouble. Une mise en lumière judicieuse de l’identité alsacienne.

Irmina_couveIRMINA de Barbara Yelin . Actes sud- l’An 2

Irmina, ou l’histoire d’une jeune allemande partie en Angleterre dans les années 30, avec ses rêves de liberté et ses espoirs d’indépendance. Contrainte de revenir en Allemagne, elle est séduite par le régime nazi et portée par une complaisance coupable. L’aquarelle illumine le dessin sombre et porte une narration sans ambiguïté sur la compromission de la grand-mère de l’auteure. Un héritage qui sonne comme un avertissement.

HORS SÉLECTION- UN HOMMAGE À JACQUELINE DUHÊME

crobards

UNE VIE EN CROBARDS de Jacqueline Duhême. Gallirmard Jeunesse

Artémisia rend hommage à la grande illustratrice Jacqueline Duhême, au travers de son livre Une vie en crobards. Ce récit illustré raconte sa vie avec fraîcheur, de l’enfance difficile jusqu’à son épanouissement en tant qu’artiste ayant côtoyé les poètes et peintres phares du XXè siècle, Eluard, Matisse et tant d’autres. Ses dessins en enluminures ponctuent le texte manuscrit. L’autobiographie atypique d’une femme libre qui réalise un album sans précédent. Événement !

La sélection Artémisia 2014

artemisia 2014A vos lectures! Voici la sélection pour le prix Artémisia 2014. La lauréate sera proclamée le 9 janvier, date anniversaire de la naissance de Simone de Beauvoir. Et le PRIX sera remis le jeudi 16 janvier à partir de 18h30 à la Librairie LA HUNE, 16, rue de l’Abbaye –75006 Paris

  • Ainsi soit-elle de Catel, GrCouv-CatelassetUne femme-symbole du féminisme et une autre femme, des- sinatrice celle-là, à son écoute, mais crayon en main. La main est habile, experte. L’oreille attentive. Résultat, un gros album où vous trouverez tout ce que vous voulez savoir sur le fémi- nisme sans jamais penser à le demander. Un petit retour en arrière pour ne pas avancer en aveugle et pour que les filles d’aujourd’hui ne régressent pas trop ! Salutaire !
  • C’est toi ma maman ? d’Aison Bechdel, Denoël Graphic
    maman
    Après Fun Home, où elle passait son homosexualité au pris- me de celle de son père, Bechdel se tourne vers sa mère. Étudiant avec sa précision d’entomologiste les rapports qui la lient depuis l’enfance à cette femme forte, au tempéra- ment artistique, mais à l’affectivité infirme (elle a cessé de toucher sa fille quand celle-ci a eu sept ans), elle trace une cartographie criante de vérité des relations mère-fille et de leurs conséquences sur la vie adulte.
  • Dark room de Lila Quintero Weaver, Steinkis
    dark room
    Immigrée venue d’Argentine, Lila Quintero Weaver pose son regard d’enfant sur le ségrégationniste en Alabama dans les an- nées 1960. Un témoignage sur les violences quotidiennes, le racisme ambiant et l’avancée des droits civiques à l’aune du récit de sa propre vie, lorsque, encore petite, elle interrogeait son identité. Une narration graphique sensible et éclairante sur un aspect peu connu de l’histoire américaine.
  • Ève sur la balançoire de Nathalie Ferlut, Casterman
    L.10EBBN001845.N001_EVEbalanc_C_FR
    Trop jeune, trop belle, trop convoitée, Evelyn « Eve » Nesbit fut une icône du début du XXe siècle, la muse du « swinging » Manhattan. Nathalie Ferlut retrace son histoire, jusqu’à la fin tragique, avec une empathie communicative. La mère abusive, le mari paranoïaque et l’amant pygmalion virevoltent sous son trait vif et se parent de riches couleurs. Un destin à méditer.
  • Jane, le renard et moi de Fanny Britt et Isabelle Arsenault, La Pastèque
    janeHélène, une adolescente persécutée par ses camarades de classe se réfugie dans la lecture de Jane Eyre, d’Emily Brontë. Puis, venant à point nommé en renfort de cette fiction, deux autres rencontres, bien réelles celles-là, vont rendre à Hélène sa joie de vivre: un magnifique renard roux au regard intelligent et une jeune fille qui devient son amie. Un récit touchant et sensible que le talent de la dessinatrice sublime.
  • L’Heure du loup de Rachel Deville, L’Apocalypse
    loup
    A l’heure du loup, lorsque le sommeil est profond, les cauche- mars les plus fous révèlent les angoisses les plus ancestrales. En hommage au film éponyme d’Ingmar Bergman, Rachel De- ville expose dans ce recueil une vingtaine de rêves éprouvants et signifiants. Le graphisme charbonneux assure la cohérence d’un ensemble saisissant de réalités nocturnes. Une virée ini- tiatique dans le labyrinthe de l’inconscient.
  • La Propriété de Rutu Modan, Actes Sud
    propriété
    À la mort de son fils, Régina retourne à Varsovie avec sa petite fille pour récupérer, croit-on, une propriété familiale spoliée pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle cherche en fait à retrouver son premier amour emporté par l’Histoire. Par l’auteur du très acclamé Exit Wounds, un récit sensible autour de la mémoire, dont la mélancolie est tempérée par la facétie et un trait « ligne claire » net et expressif.
  • La Tendresse des pierres de Marion Fayolles, Magnani
    tendresse

    Un très bel album, fait avec un soin extrême par un éditeur respectueux du travail de l’auteure. D’autant plus respec- tueux que le sujet est délicat : la maladie mortelle, l’agonie d’un père encore jeune. Mort parfois affrontée de face sur un mode réaliste, parfois en se réfugiant dans le symbolique et l’imaginaire dans un registre surréaliste, poétique. Une poésie noire et élégante malgré la dureté extrême du sujet. Magnifique !
  • Le cirque de Ileana Surducan, Makaka
    cirque
    Place au spectacle avec Manu, le dompteur de chaise ! Ileana Surducan installe son cirque fantastique au sein d’une cité où « La raison éclaire l’esprit » et les rêves illuminent l’ima- ginaire. Le graphisme accompagne une dramaturgie toute en dualité, entre le noir et blanc, et la couleur, le jour et la nuit, révélant le fragile équilibre entre le connu et l’inconnu. Une fable contemporaine sensible et enchantée.
  • Les filles de Montparnasse, t.3 Les jupes noires de Nadja, Olivus
    nadja
    Paris, années 1870 : le destin de quatre femmes artistes et/ou intellectuelles dans une France enfin républicaine, mais tou- jours dominée par les hommes. Les avant-gardes artistiques ou féministes — pas fatalement incompatibles — se précisent comme autant de solutions — parfois douloureuses — à leur situation dominée. L’esthétique de Nadja, proche de celle d’un Vallotton ou d’un Raison, colle exactement au propos.
  • Les incrustacés de Rita Mercedes, L’Association
    incrustacés
    Sur un scénario fantastique très dense, un dessin d’inspira- tion vernienne, à raison de deux à cinq monocolores sépia par page et une narration solide, Rita Mercedes a réalisé l’oeuvre de sa vie. Remarquable illustratrice, elle réussit son entrée dans la BD de façon spectaculaire. Cousine de l’uni- vers d’un Topor ou d’un Gourmelin, alliant réalisme et cari- cature, elle réalise un album sans précédent. Événement !
  • Mauvais genre de Chloé Cruchaudet, Delcourt
    mauvais genre
    Quelques images suffisent à planter le décor de l’effroyable guerre des tranchées en toile de fond. Paul déserte et, pour échapper aux recherches, mènera, jusqu’à l’amnistie de 1925, une vie de travesti dans le Paris des années folles, avec la complicité de sa femme. Chloé Cruchaudet s’appuie sur cet- te incroyable histoire vraie pour (se) jouer, avec virtuosité, des stéréotypes du masculin et du féminin.Troublant.
  • Moscou endiablé de Bettina Egger, Le Moule-à-Gaufres
    moscou
    Moscou endiablé n’est pas une adaptation du célèbre chef d’œuvre de Mikhaïl Boulgakov, Le Maître et Marguerite. Pas- sionnée par la littérature russe, Bettina Egger part sur les traces de l’écrivain à Moscou et parvient à conjuguer le réel et la fiction dans un album finement ouvragé où alternent planches en noir et blanc et croquis de voyage à l’aquarelle. Un formidable travail d’enquête et un brillant hommage.

La sélection Artémisia 2013

Capture d’écran 2013-04-10 à 14.57.53

CharonneCHARONNE-BOU KADIR de Jeanne Puchol . éditions Tiresias- Le massacre du métro Charonne en 1962, replacé dans le contexte des deux dernières années de la Guerre d’Algérie (du referendum sur l’autodétermination à la signature des Accords d’Evian), est res- titué par Jeanne Puchol avec force, rigueur et tact. Le noir et blanc renforce le reportage, la fiction n’empêche pas la documentation. Un des meilleurs albums de Puchol.

dessousDESSOUS de Leela Corman . Cà & Là

À l’orée du siècle dernier, dans le quartier juif de New York, les femmes ont bien peu d’emprise sur leur vie. Fanya et Esther, deux sœurs jumelles qui grandissent dans une boutique de dessous fé- minins vont suivre des chemins opposés. Fanya milite pour l’avortement, Ester devient prostituée, femme entretenue, puis reine de la scène. Deux destins aussi puissants que le trait noir et dansant de l’auteur.

ensilenceEN SILENCE d’Audrey Spiry . KSTR

Cet album prouve que la bande dessinée est bien un art et pas seulement une narration où l’image serait un véhicule secondaire. Nous saluons ici ce travail artistique et ces images qui voguent au fil d’une journée de canyoning agitée. Si le couple formée par Juliette et Luis risque de ne pas survivre aux remous de la rivière (et des sentiments), le talent d’Audrey, lui, en sort sublimé.

euclideEUCLIDE de Cecily . Même pas mal

En une case par page, Euclide joue sur les décalages sur- réalistes, rendant hommage à la ligne claire et aux BD des années 40, que Cecily a découvert en lisant Dick Tracy. Un premier tome abouti où l’on suit la trajectoire d’Euclide qui cristallise tout ce que l’homme peut faire de pire à une femme. De la femme objet à la femme au foyer, de la mère à la putain, la dessinatrice reprend à son compte un com- bat féministe hélas encore d’actualité.

bourréeJE SUIS BOURRÉE MAIS JE T’AIME QUAND MÊME d’Anaïs Blondet . Onapratut

Jour et nuit, quelque soit l’heure, l’héroïne de ces petits mo- ments de vie est bourrée comme un coing. C’est son seul plaisir, car les mecs ne se bousculent pas dans sa vie et comme l’alcool rend moche, ça ne s’arrange pas. Sur cette trame trash et d’une rare auto- flagellation, Anaïs Blondet a fait un petit album décapant et à contrepied de la mode : une BD «girly qui vomit», ça fait du bien quand le «girly» fait vomir.

AGLAE_couv.inddLA GESTE D’AGLAÉ d’Anne Simon . Misma

Tout droit sortie de l’album Sergent Pepper’s des Beatles, Anne Simon s’inspire de Being for the Benefit of Mr Kite! pour camper l’univers onirique où se joue sa Geste d’Aglaé. Avec humour, les personnages valsent entre raison et passions. Aglaé, tour à tour, femme abusée, mariée de force, reine toute puissante, amoureuse et mère soumise joue l’héroïne de cette comédie humaine et féministe.

philoLA PETITE PESTE PHILOSOPHE de Vanna Vinci . éditions Marabulles

Vanna Vinci, Un Quino au féminin? Mais la gamine a les dents plus pointues que Mafalda. On ne pouffe pas à chaque vignette mais on apprécie l’esprit grinçant. Une petite fille pas infantile, ça change des adultes qui les sont trop souvent. Avant même de naître la “peste” semble avoir tout compris du monde où elle débarque, sinon pourquoi vouloir ne sortir du ventre de sa mère qu’en présence de son avocat?

rondeLA RONDE de Birgit Weyhe . Cambourakis

Au principe du récit-tourniquet mis en œuvre par Schnitzler dans sa célèbre pièce éponyme,BirgitWeyhe ajoute celui d’une traversée du siècle. Entre 1917 et 2011 se succèdent des portraits d’hommes et de femmes reliés par une médaille de baptême accrochée à une chaîne. En dépit de cadrages un peu répétitifs, le récit intéresse de bout en bout et surprend par de belles trouvailles graphiques.

le-livre-des-nuages_couvLE LIVRE DES NUAGES de Fabienne Loodts . Warum

Du beau roman de Chloe Aridjis, Fabienne Loodts traduit avec beaucoup de sensibilité le côté anxiogène du séjour de la jeune Mexicaine Tatiana à Berlin. Entre deux âges, entre deux nuances de gris, entre deux hommes – un vieil érudit qui revisite le douloureux passé de la ville et un jeune métérologue amoureux du ciel –, la jeune femme se laisse dériver et nous fait partager sa mélancolie urbaine.

montparLES FILLES DE MONTPARNASSE de Nadja . Olivus

Fin XIXe. Quatre femmes, artistes sont confrontées à la domination masculine. Derrière la fiction, on devine Camille Claudel ou Yvette Guilbert. Dans ce premier tome, Amélie sauve un écrivain d’une crise d’inspiration – et s’en trouve récompensée par son «licenciement». Mais ces quatre-là ont de l’énergie à revendre – tout comme Nadja, dont l’art dynamique contraste avec l’atroce des situations.

moinsbeteTU MOURRAS MOINS BÊTE T.2 de Marion Montaigne . Ankama

Avec ce deuxième opus du savoureux Tu mourras moins bête, issu de son blog, Marion Montaigne et son avatar le professeur Moustache s’attaquent au corps humain, ses mystères et ses misères. Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l’anatomie, les virus et bactéries, servi par un dessin et des commentaires hilarants qui n’en dissimulent pas moins une approche scientifique documentée et sérieuse.

La sélection Artémisia 2012

Artémisia2012

Chloé Cruchaudet, Ida, Candeur et abomination t. 2, éditions Delcourt

 Vieille fille excentrique, Ida parcourt toujours l’Afrique coloniale de la fin du XIXe. Déjouant les clichés sur l’exotisme, Chloé Cruchaudet dévide avec malice le fil de ce voyage initiatique qui conduit son héroïne à la cour du roi du Dahomey. Dépaysement garanti.

 

Claire Braud, Mambo, L’Association

Une maison idéale gardée par un tigre géant; un fonctionnaire initié d’un coup de poële à frire à la sérénité; un homme, un vrai, dont les dents pointues l’empêchent d’embrasser; un mystérieux chauffeur
de bus et Petula Peet, dissimulant sa peur d’aimer derrière une improbable malédiction familiale. 
Un trait sûr et gracile chorégraphie ce mambo amoureux, sensuel, surréaliste. La vie telle qu’elle pourrait être.

Marine Blandin, Fables nautiques, éditions Delcourt 

Les trois sorcières ne marmonnent pas leurs sortilèges au fond de la forêt, elles sont juchées au point culminant de la piscine qu’elles couvent en observant leur petit monde. Le complexe nautique comme un univers en soit, avec ses espaces végétaux infinis et leur respiration inquiétante, avec les «cuisseuses», ces nageuses qui ne s’arrêtent jamais, ses bassins remplis d’une faune dangereuse, et cette vieille au bonnet rouge qui va chaque jour lancer des carottes dans le grand bassin à la fureur du maître nageur. Un premier livre fantasque, émouvant, où se déploie un dessin dynamique et un sens de la dérision réjouissant. 

Sybilline et Natacha Sicaud, Sous l’entonnoir, éditions Delcourt 

Le 10 novembre 1995 Sybilline, étudiante âgée de 17 ans, est hospitalisée pour syndrome dépressif majeur. Avec Sous l’entonnoir le Prix Artemisia salue une oeuvre, puissante, courageuse, talentueuse, qui en plus se termine sur une note optimiste : « Je pensais me perdre dans des dosages médicamenteux sans intérêt, mais non. Il y a de l’empathie, des constats justes… » écrit l’auteure à propos de son dossier médical. Magnifique!

 

Karine Bernadou, Canopée, éditions Atrabile

Histoires brèves et muettes formant un roman graphique, noir, blanc, rouge, Canopée passe d’une narration réaliste à la fantaisie la plus débridée. L’héroïne enfant, adulte, en fuite, en amour, ensauvagée, semble sans désir ni but. Allégorie glissant de drame en gag, ce troisième album de Karine Bernadou, illustratrice jeunesse et ex-lauréate Jeunes talents à Angoulême témoigne d’une forte originalité.

 

Sarah Glidden, Comment comprendre Israël en 60 jours ou moins, éd. Steinkis

Comment comprendre Israel en 60 jours ou moins ou le compte-rendu, sous forme BD, du premier séjour en Israel d’une jeune Américaine (le Golan, le lac de Tibériade, Tel Aviv, le désert, Jérusalem…). Un sujet « chaud » que l’auteur traite avec intelligence, distance, humour et talent. Un glossaire et une chronologie en fin d’ouvrage.

 

Lucie Lomova, Les Sauvages, éditions Actes Sud l’An 2

Les Sauvages évoque la rencontre entre un botaniste de Prague et un indien du Paraguay en 1909. Qui est le sauvage ? Qui est le civilisé ? Histoire forte et actuelle, sur l’humanité de l’étranger. Le dessin est parfaitement lisible, la mise en couleurs adaptée au récit; un travail soigné, maîtrisé. Par une auteur tchèque reconnue dans son pays.

 

Joyce Farmer, Vers la sortie, éditions Actes Sud l’An 2


La vieillesse, la décrépitude, la dépendance… Joyce Farmer prend à bras le corps des sujets douloureux dans ce récit autobiographique du long accompagnement de ses parents vers la sortie. Sans concession, mais sans complaisance larmoyante. Une narration au scalpel, servie par les détails d’un dessin très fouillé et éclairée de touches d’humour.

 

Anke Feuchtenberger &Katrin de Vries, La Putain P jette le gant, éditions FRK

Grande prêtresse de l’école de BD de Hambourg, Anke Feuchtenberger reprend son personnage fétiche pour trois récits indépendants. Confrontée à un homme de pouvoir puis à un autre qui refuse de la courtiser, la Putain P se perd dans un zoo et hante un bal désert. Les mots sont volontairement pauvres et rares, les images puissantes, symboliques, énigmatiques.

Marion Montaigne, Tu mourras moins bête, éditions Ankama

Astrophysique, aéronautique, balistique, géologie…Avec humour et une salutaire distanciation la professeure Marion Montaigne répond aux questions que se posent aussi bien les enfants sages que les savants fous. Trash, geek et surtout bien informée cette dessinatrice a trouvé la bonne formule .Quelques touches légères à l’aquarelle agrémentent
ses dessins, saisis sur le vif. La rapidité du trait et la concision des mots font mouche.

Marion Fayolle, L’homme en pièces, éditions Michel Lagarde

Une collection de saynètes impertinentes sur la solitude, le narcissisme, la séduction, l’incompréhension entre les sexes. L’absence de paroles, le trait délicat, les couleurs pastel, les personnages à l’allure de pantins font un très bel objet et un support à la rêverie.

La sélection Artémisia 2011


cadavreexquis

CADAVRES EXQUIS de Pénélope Bagieu . Gallimard Bayou

Zoé s’ennuie. Travail sans intérêt, compagnon désespérant. Elle serait sans doute morte d’écoeurement si le hasard ne lui avait fait rencontrer un étrange écrivain à succès en panne d’inspiration. Histoire bien menée, drôle, bourrée de surprises…

coutorduCOU TORDU de Caroline Sury . L’Association

Quoi de plus banal, apparemment, qu’un torticolis ? C’est pourtant ce “cou tordu” qui va mener la narratrice, dessinatrice marseillaise survoltée, d’acupuncteur en ostéopathe, dans l’exploration de ses tensions intérieures. Une mise en abyme foisonnante des tourments de la création, qui prend pour toile de fond le Marseille déjanté des artistes, servie par un dessin tout aussi déjanté et luxuriant.

drolesdefemmesDRÔLES DE FEMMES de Catherine Meurisse &Julie Birmant . Dargaud

Elles ont choisi de faire rire… À moins que le rire ne se soit imposé à elle, et que leur triomphe sur scène, à l’écran, ou dans leurs livres soit leur ultime arme de défense ? Sylvie Joly, Yolande Moreau, Anémone, Amélie Nothomb et autres “drôles de femmes” se laissent croquer à leur tour et se dévoilent, avec délicatesse et panache.

ROSE D’ELISABETHVILLEROSE D’ELISABETHVILLE de Séraphine et Tilde Barboni . Dupuis

Rose a grandi au Katanga. En 1960, elle est infirmière et soigne à Bruvelles les nombreux rapatriés de la décolonisation du Congo Belge. Avec son mari, journaliste anticolonialiste, elle va se trouver au coeur d’un sombre imbroglio mêlant affairisme et politique. Un récit d’aventure efficacement troussé, une course au trésor sur fond de bouleversements politico-historiques rarement abordés en BD.

frances2

 

FRANCES 2 de Johanna Hellgren . Cambourakis

Joanna Hellgren fait de chaque case un tableau où se déploie un subtil nuancier de gris, de noirs et de blancs. Elle crayonne, avec une extrême sensibilité, des visages et des paysages presque au bord de l’effacement. Mais elle les retient du bout délicat de son crayon et ses fragiles figures se mettent à vivre, à palpiter comme aucune autre.

 

interieur-giandelliINTÉRIEUR de Gabriella Giandelli . Actes Sud BD

Dans l’anonymat d’une cité HLM style “clapiers maudits”, un lapin blanc comme les peluches de nos enfances nous fait gambader d’une case à l’autre. Relié au monde souterrain, ce lapin lunaire est au service du “Grand Sombre”, matrice des songes nocturnes des habitants, sorte d’inconscient collectif sur lequel tout repose. Le lièvre de Gabriella s’est levé… Peut-il soulever et ressusciter les morts ?

L.10EBBN001001.N001_ENFANTenv_C_FRLES ENFANTS DE L’ENVIE de Gabrielle Piquet . Casterman, Écritures

Basile vit encore avec sa mère. Employé de mairie, il partage son temps libre entre la peinture, la recherche d’une compagne et la méditation sur ses origines. Le père qu’il n’a jamais connu serait un Américain dont il ne reste que le prénom, Henry, autrefois soldat à la base militaire U.S. de Laon . Une soirée de vétérans est prévue, où sont invités tous les anciens de la base. Henry viendra-t-il ? Un récit à la fois riche et poétique soutenu par un trait fin d’une grande délicatesse.

L.10EBBN001034.N001_ESPIONsta_C_FRL’ESPION DE STALINE de Isabel Kreitz . Casterman, Écritures

Richard Sorge, journaliste allemand en poste à Tokyo et espion soviétique, infiltre l’ambassade nazie au Japon. Il y apprend les secrets du Reich, notamment l’invasion de l’URSS en juin 1941. Mais Staline refusera de l’entendre… Isabelle Kreitz retrace le dernier été de cet intellectuel rouge antistalinien dans un album-documentaire tout au crayon qui nous plonge dans le Tokyo de la Seconde Guerre mondiale.

homme-de-mes-reves-nadjaL’HOMME DE MES RÊVES de Nadja . Cornélius

Kate rêve sa vie et vit ses rêves. Pour échapper aux griffes d’un macho cynique, elle gagne la forêt, lieu symbolique où se tranche la question du choix entre l’amour et l’art. Soutenu par une gouache organique où court un trait rouge comme un fil d’Ariane, ce faux polar, sensuel et onirique, ne révèle pas tous ses secrets. Le livre se referme, mais le rêve demeure.

peindre sur le rivagePEINDRE SUR LE RIVAGE de Anneli Furmark . Actes Sud – L’An 2

Hélène revit ses années d’étudiante en feuilletant son journal intime. Elle a quitté Stockholm pour l’école d’art d’une petite ville du Nord, au bord de la mer. Là, elle tente de découvrir son identité d’artiste et de femme, au travers de rencontres féminines et masculines, exaltantes ou décevantes… et finit par apprivoiser un environnement ressenti d’abord comme hostile. Au point de s’ancrer sur le rivage.

ullilustTROP N’EST PAS ASSEZ d’Ulli Lust . Cà &Là

Dignes filles du Punk, Elli et Edi n’ont pas froid aux yeux et n’hésitent pas à partir à l’aventure en Italie, sans papiers ni argent. Au cours de leur périple, dans la dèche de Vienne à Palerme, elles subiront de plein fouet le machisme sicilien et connaîtront les affres parfois sordides des routardes qui voyagent en mauvaise compagnie. Un road movie initiatique et sensible, un récit très dense qui ne vous lâche plus.